L'illusion première est de croire que j'ai besoin de reconnaissance, d'où qu'elle vienne quelle qu'elle soit. L'illusion seconde est d'imaginer que j'aime écrire.
Derrière moi remuent des monstres peu avenants. Ils sont sales et bruyants. Ils sont fiévreux et fatigués. Ils ont la raison pour eux et ils crient. Tu n'aimes pas écrire, tu n'aimes pas écrire. Un peu plus et ils danseraient sur une boucle infinie qu'une transcription binaire de ces mots simples aurait transformé en octets bancals. Tu n'aimes pas écrire, et tu n'aimes pas lire non plus. Tu n'aimes pas la musique qui te frustre et le cinéma qui te désespère, dans la grandeur comme dans la médiocrité. Tu n'aimes pas écrire et tu n'as pas besoin d'écrire. Le besoin que tu ressens soi-disant tu te le crées comme excuse. Ta muse n'existe pas, et si elle existe c'est aujourd'hui une vieille amante que tu n'as jamais vraiment honorée. Et si tu l'as honorée c'est uniquement par peur du vide sidéral que figure ta vie isolée de toute ambition.
Tu combles comme tu vomis après avoir trop bu. Pour calmer l'ensemble. Tu combles dans l'illusion troisième que cela t'apporte quelque chose.
Tu n'aimes pas écrire et tu n'en as pas besoin. Lire te terrorise par ta lenteur d'appréciation du mal déjà fait à ton cerveau et à ta carcasse. Ecouter te perturbe et te déprime sur la longueur des années sans suspens. Regarder te tue à feu faible.
Tu n'aimes pas écrire, écoute et crois-nous, nous te le crions.