(la suite de ça)
Novembre entre dans la place. Plus qu'aucune autre, elle est blasée plutôt qu'en colère. Le bordel apparaît innommable.
D'une voix forte et suffisamment assurée, elle appelle.
N : Octobre ! Octobre ! T'es où ? Qu'est-ce que tu fous ?
O : (entre dans la pièce à 2 à l'heure. Yeux cul de poule, cheveux Waterloo, habillée d'un simple bas de pyjama, assez sexy mais un peu sale) Ouais, ouais, j'arrive, j'arrive, crie pas, steuplaît.
N : Tu te moques de moi ? T'as vu l'heure ?
O : (se gratte le sein droit) euh, non... mais tu vas me le dire (baille)
N : Il est exactement 15h43 !
O : Ah weh, quand même...
N : T'as fait quoi exactement, depuis ta prise de poste ?
O : (elle essaye de réfléchir) Bah, pas grand-chose, j'imagine ?
N : Tu peux préciser? J'ai pas très envie de crier, mais ça m'intéresse quand même ! (en fait, si, elle commence déjà à hausser la voix...)
O : S'il te plaît, pas trop fort. On a vachement arrosé le passage à l'heure d'hiver, depuis la semaine dernière, j'ai un mal de crâne à se couper le bras pour penser à autre chose.
N : (soupire) Arrosé ? Avec qui ?
O : Bah, avec Juillet et Août, au début. Elles s'étaient engueulées, toutes les deux, beaucoup, et s'en voulaient d'avoir laissé au final tout le rangement et le boulot à faire à Septembre, qui avait aucune envie de travailler non plus... Alors elles sont repassées à l'appart, parce qu'elles voulaient se faire pardonner.
N : Septembre était là aussi ?
O : Non, pas au début. Mais on l'a pas attendue et les apéritifs sont tombés très vite.
N : Je veux pas savoir, c'était la semaine dernière, t'avais eu tout le temps avant, pour faire le ménage !
O : Bah, je sais, je sais, j'étais pleine de bonne volonté, je te jure. Je me suis dit que ça pouvait bien être à mon tour de faire un effort. Mais qu'est-ce que tu veux, j'ai perdu le fil. J'ai commencé à jouer à l'ordinateur, à mater la télé. Et pis, tu sais qu'on se sent seule, ici, alors j'ai cherché un peu de compagnie. Et je suis tombée sur un mec du calendrier lunaire...
N : (stupéfaite) Là, je suis sans voix
O : (explique) faut pas, faut pas. On a fait ça dans les règles de l'art. On a appris à se connaître, et on a vite enchaîné avec les cochonneries.
N : (moue dégoûtée) je veux pas savoir...
O : (sourire épanouie) en tout cas c'est vraiment un bon coup, et il est adorable. Le seul problème est qu'on a dû mal à accorder nos emplois du temps...
N : (sarcastique) Je suis bien désolée pour toi
O : (explique toujours) faut pas faut pas, je suis sûre qu'on trouvera un moyen.
N : Laisse tomber. Le prends pas mal, mais là, tes histoires de cul, je m'en fous royal. On a surtout une coloc à faire tourner. Septembre, elle a fait quoi, alors ?
O : (se gratte le ventre, le temps de remettre ses idées en place ) Bah, Septembre, elle est arrivée après la dégustation des vins... Le mal était déjà fait, je te le dis, moi. Mais elle a une descente d'enfer donc on a bien bien rigolé jusqu'à hier soir où je crois qu'Août a manqué de peu le coma éthylique. Juillet l'a ramenée, genre transportée à la gare, et elles sont finalement parties toutes les deux. Je t'avoue que je sais pas trop vers où ; j'étais bien torchée aussi (elle gémit et porte les mains à ses tempes)
N : (ton réprobateur) Franchement, vous avez quel âge ?
O : (arrangeante) Bah, une année de temps en temps ça fait de mal à personne...
N : Si, à moi, déjà, maintenant, et à nous toutes. Ce bordel va pas pouvoir s'accumuler très longtemps. Il va vraiment falloir agir...
O : (montre la caméra) Bah, l'autre con, derrière l'écran, là, il dit qu'il manque d'idées, qu'il est fatigué...
N : (décisive) On s'en fout, il fera ce qu'on lui dit de faire, c'est lui qui nous obéit, pas l'inverse !
O : D'accord, d'accord, tant mieux, mais par pitié, arrête de crier, s'il te plaît !
N : Et va pas croire que je ne vais pas te punir après avoir entendu et constaté ta conduite, vos conduites inqualifiables, à toutes les trois !
O : (inquiète) ah ? Et ce sera... quel genre de punition ?
N : Les Guns'n Roses, mon heure de gloire, avec plein de solos de guitare ! (sadique)
O : NAAAONNNN, PITIÉÉÉÉ !
(T : yep, et en plus il pleut vraiment au moment où je mets en ligne. Si ça c'est pas la classe, alors dites-moi ce qu'est la classe...)